Next Sohee

Bien que le choix d’abandonner la protagoniste principale au milieu du film soit un geste très fort, il n’est pas comparable aux détournements formels en dialogues avec le public qui étaient en vogue dans les années 1970. Plus que dans l’effet de surprise, le secret de Next Sohee se tient dans la profonde cohérence narrative d’un film où, par le biais de ce choix inusuel, nous découvrons que la vraie protagoniste est une machine sociétale aux mille visages asservie à l’idéal hyper-productiviste de la performance compétitive.

Le film de July Jung est donc l’analyse d’une société qui devient machine, une société qui, sans en être (toujours) véritablement consciente, conspire contre tout esprit d’humanité pour suivre le chemin du paroxysme capitaliste. Avec l’accusation ouverte de la malhonnêteté des cadres, Next Sohee insiste sur la faute d’omission, sur le défaut d’humanisme qui ne semble épargner personne, à l’exception héroïque de l’inspectrice Oh Yoo-jin (Doona Bae), prolongation amère et revanchiste de la figure humaniste de Kim Sohee (Kim Si-eun), qui confirme également le caractère genré de l’analyse de July Jung. Par son histoire, la réalisatrice coréenne construit un paradigme au pouvoir éducatif – quelque fois très expressément éducatif – lequel se révèle d’autant plus urgent et douloureux qu’il prend grand soin à la vraisemblance réaliste des détails.