Los colonos

De Werner Herzog à Lucretia Martel jusqu’au Rey de Niles Atallah (2017), les films qui se concentrent sur l’histoire du colonialisme en Amérique du Sud ont souvent souligné la dimension métaphysique du voyage, où la nature l’emporte sur la culture de façon destructrice. Or, dans Los colonos de Felipe Gálvez Haberle, les moments de transcendance ne manquent pas, reliés spécialement à la nature grandiose des paysages (la photographie de Simone D’Arcangelo est très belle), mais c’est surtout la nature bestiale et cruelle de l’être humain qui prime. En ayant parfois la main un peu trop lourde sur les scènes de violence qui empruntent au genre western, le film a son moment de force à travers sa coupe narrative qui survient dans sa deuxième partie où nous plongeons dans le luxueux refuge des « bourreaux » responsables des violences coloniales que nous avons vécu jusque-là. Un cinéma de parole soigné s’installe. Il n’apporte pas seulement des importants éléments explicatifs à l’histoire, mais donne à l’aventure coloniale – et aux éléments d’aventure du film – un encadrement précieux, qui nous permet de passer de la cruauté à la perversité et au cynisme de l’homme colonial, un trait vivement actuel encore de nos jours. Par cette construction originale, Los colonos s’émancipe de l’exhibition facile de la violence en lui donnant une perspective et ainsi une véritable profondeur.

Los colonos – The Settlers | CHL-ARG-UK-TWN-FR-DK-SW-DE 2023 | 97’ | FIFDH Genève 2024
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