La disparition des Aïtus

Tuvalu: un État qui disparaît lentement sous l’eau, dont on a déjà eu récemment une belle documentation avec _ThuleTuvalu_ de Matthias von Gunten. Si dans ce dernier un discours engagé dénonce, témoigne et illustre, le court-métrage de Pauline Julier opte pour un tout autre angle de vue, en mettant au centre du récit filmique la légende des Aïtus, également en train de disparaître de la mémoire collective. Il s’agit au fond d’une autre revendication, non pas celle liée à la catastrophe environnementale, mais celle qui défend la culture populaire comme âme du lieu, _genius loci_. Entre histoire coloniale et étude anthropologique, ce qui frappe dans _La disparition des Aïtus_, c’est la rigueur impressionnante du film, sa justesse, et sa richesse d’idées formelles. Le son et la musique, le style du récit, l’usage symptomatique des images, souvent plongées dans la nuit, l’essentialité du texte : chaque élément est soigné avec intelligence pour construire un langage original. Nous sommes heureusement loin du journalisme qui affecte si puissamment tant de films documentaires, et nous avons l’impression de retrouver une empathie pour le réel, certainement plus efficace que les descriptions documentaires qui poursuivent le mythe de la neutralité. L’enseignement de l’anthropologie, dont on oublie souvent la critique fondamentale de la prétendue neutralité de l’observation scientifique, anime cet essai filmique en lui donnant une grâce et une justesse précieuses.

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La disparition des Aïtus | Film | Pauline Julier | CH 2014 | 35’ | Solothurner Filmtage 2016

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First published: April 27, 2016